Existe-t-il en l’homme un instinct hiérarchique et une tendance irrésistible à s’organiser en grades ? Certains critiques ont nié l’existence de cet instinct. Alexander Pope, poète Anglais l’avait noté il y a plus de 250 ans, en y voyant même l’expression d’un principe divin. Il écrivit ceci dans son essai sur l’homme en son épitre IV « L’ordre est la première loi du Ciel et ce principe accordé, il y a et il doit y avoir des hommes plus puissants que les autres »
Voilà une reconnaissance théorisée de la hiérarchie que Karl Marx , chantre de société non-hiérarchisée a pourtant reconnu quand il écrivait avec une incohérence flagrante de sa société idéale non hiérarchique « A chacun selon ses capacités, et à chacun selon ses besoins »
Le débat de la compétence, de la nature et des acquis ne date pas de nos jours.
La question de la prise en compte du genre en milieu professionnel renvoie aux stratégies et actions mises en œuvre pour l’égalité de traitement des hommes et des femmes au sein d’une organisation. Les mots forces qui viennent souvent sont : reconnaissance, appréciation, acquisition ou maintien des compétences ; tout ceci sanctifié par la promotion des femmes comme des hommes.
En effet, l’égalité professionnelle femme/homme a toujours été fortement au cœur de la problématique du genre, l’un des objectifs de gestion consistant à en faire un élément stratégique de succès de l’entreprise.
Une stratégie efficace reposerait sur le degré de sensibilisation dont on fait preuve, de l’adhésion des mentalités et les actions tant des employeurs que des employés. Il s’agit de l’un des enjeux organisationnels fondamentaux de notre époque, qui doit s’inscrire dans la vision et la stratégie du milieu de travail.
Mon exposé va d’abord tenter d’énoncer certaines de nos aspirations en matière d’égalité homme/femme en entreprise. Je vais ensuite nous introduire aux divers obstacles qui s’érigent contre l’accomplissement de ces aspirations ; obstacles pour lesquels nous indiquerons quelques possibilités de dépassement et enfin nous énumérerons certaines mesures pratiques adoptées ou pas et qui visent l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.
I- A quoi la société d’aujourd’hui aspire-t-elle ?
Le développement de la capacité – notre capacité à tous – à créer des organisations qui fonctionnent pour tous constitue la pierre angulaire à tout projet de société. À tous les niveaux, employés et employeurs doivent communiquer les uns avec les autres dans un climat de respect, de reconnaissance, de confiance et de recherche d’efficacité. Au sein de cette communauté acceptée de dessein, la prise en compte du genre reposerait sur une riche combinaison de personnes (hommes comme femmes) qui apporteront collectivement un mélange complexe d’attributs, de perspectives, de comportements, d’intérêts communs et de talents. Un mélange tout aussi dépendant et attributaire de ces différences, qui en somme, restent positives et animent la diversité en milieu de travail. Hommes et femmes aspirent à la bonne appréciation de leurs rendements, à la reconnaissance toute aussi naturelle qui leur serait due et à la promotion des compétences qui sous-tendent leurs réalisations. Les ressources allouées doivent être équitables sans qu’on ait à défoncer des portes déjà ouvertes.
Le genre est pris en compte lorsque tous les employés, peu importe le sexe, la race, l’ethnie, les capacités, l’orientation sexuelle ou l’âge, font l’objet d’une reconnaissance et d’un respect égaux. Quand les hommes et les femmes sont équitablement dotées des ressources mises en place, quand ils ont accès aux mêmes récompenses qu’ils utilisent sans discrimination les mêmes possibilités qui sont offertes, nous répondrions aux aspirations naturelles. Que ce soit celle de l’homme ou de la femme. Nous irions plus loin en disant que la diversité selon le genre requiert l’existence, en milieu de travail, de politiques et de pratiques intégrant les expériences et les besoins différents des hommes et des femmes.
II- Comment y parvenir
1- Identifier les obstacles et y travailler
Selon les recherches, la sous-représentation des femmes dans plusieurs secteurs professionnels et dans les rôles de direction découle d’un vaste ensemble d’obstacles d’ordre systémique, comportemental et situationnel. Parmi ces obstacles, on peut citer :
- Obstacles structurels, principalement en lien avec les systèmes d’embauche et de promotion où le manque de leadership et d’engagement de la part des directions concernant le recrutement et l’avancement des femmes au sein des organisations obère la marche harmonieuse des organisations.
- Il est vrai que les femmes sont davantage représentées dans les activités support (ressources humaines, service commercial, affaires juridiques…) que dans le métier opérationnel (Ingénieurs, techniciens avions, pilotes par exemple.
- Aussi, bien que l’aptitude physique dévolue à ces métiers demeure une condition de son exercice, cette discrimination fondée sur la force s’estompe en raison de la mécanisation des équipements à bord des avions et du développement de l’assistance technique aussi bien modernisée. En forçant parfois à l’adaptation et en modernisant l’ergonomie des postes, la féminisation permet d’améliorer les conditions de travail de tous. L’enjeu est grand : déconstruire les préjugés de sexe attachés aux métiers de l’industrie aéronautique, et valoriser ces filières auprès des populations les plus jeunes.
- A ASKY nous nous sommes donnés pour mission d’inciter les jeunes filles à embrasser des métiers techniques, scientifiques et d’ingénierie, jusqu’alors davantage plébiscités par des garçons.
- Culture du milieu de travail et aussi de chaque organisation. Les hommes et les femmes déteignent sur les organisations dont ils ont la gestion.
- Conceptions culturelles à l’égard du travail des femmes, de leur accession à des postes de décisions ;
- Manque de modèles et de mentors : parfois, les hommes ont de la difficulté à servir de mentor à une femme. Cela peut s’expliquer par le manque d’intérêts communs ou la crainte qu’une relation étroite puisse être jugée inappropriée. Pour ces raisons et pour d’autres motifs, les hommes ont plutôt tendance à effectuer du mentorat auprès d’autres hommes et à maladroitement véhiculer un certain ostracisme à l’égard des femmes.
- Manque de soutien en matière de perfectionnement professionnel ;
- Attitudes, mentalités négatives et manque de sensibilisation ;
- Les perceptions liées à la personnalité qui peuvent être différentes pour les femmes pour les hommes. Par exemple, une femme peut être perçue comme étant autoritaire alors qu’un homme est perçu comme ayant de bonnes aptitudes de leadership. Une femme peut être considérée comme étant insistante, alors qu’un homme sera considéré comme étant persuasif etc….
- Les obligations familiales plus naturellement prises à cœur par les femmes
Il convient d’étudier des moyens de travailler à briser progressivement ses obstacles.
2- Adopter des mesures pratiques visant l’égalité professionnelle femme/homme
A- Créer et favoriser la diversité selon le genre au sein de l’effectif
Il s’agit pour l’entreprise de s’engager vers la recherche de la diversité du genre et l’intégration des femmes à tous les niveaux, notamment dans les métiers principalement considérés comme masculins.
Pour y parvenir, il faut adopter une démarche à plusieurs étapes. Ces étapes consisteront à :
- définir les politiques et engagements de la direction en matière de prise en compte du genre ;
- procéder à une analyse organisationnelle des rôles de direction;
- procéder à une analyse comparative des données d’emploi selon le genre;
- procéder à une analyse comparative des salaires de tous les employés selon le genre; élaborer et mettre en œuvre un plan d’action ;
- communiquer sur la vision, les politiques de la direction, et les plans d’action ;
- mettre en œuvre le plan d’action;
- assurer le suivi et l’évaluation du plan d’action ;
- continuellement sensibiliser sur le fait que la création d’un effectif diversifié est une responsabilité collective et ne doit pas être perçue uniquement comme un enjeu de la direction de l’entreprise, ou des ressources humaines.
B- Instaurer des programmes de parrainage et formation
Les programmes de parrainage/mentorat et de formation sont d’excellents moyens de promouvoir l’avancement des femmes dans les postes de gestion et dans les emplois où elles sont sous-représentées.
Ils permettent aussi que les plans de relève offrent des opportunités égales aux femmes et aux hommes.
C- Revoir l’organisation du travail pour aider à concilier les obligations de travail et les obligations familiales
Tous les employés ont des responsabilités, puisqu’ils doivent s’occuper de leur propre personne, d’autres adultes et d’enfants. Les milieux de travail ont un rôle important à jouer afin de favoriser un environnement professionnel sain et apte à faire preuve de souplesse, au sein duquel les responsabilités extra professionnelles des employés sont prises au sérieux.
Force est de constater que les femmes assument la majeure partie de ces responsabilités. En effet, les femmes demeurent les principales pourvoyeuses de soins, même si la responsabilité de s’occuper des enfants et des autres proches revient aux femmes comme aux hommes.
Fort de ce constat, il peut être prévu des mesures d’assouplissement des régimes de travail pour aider les femmes principalement à s’acquitter de leurs responsabilités familiales. Il y a diverses mesures que peuvent prendre les employeurs pour les aider les femmes à concilier sainement leur vie professionnelle, leur vie familiale et leur vie privée.
Certaines mesures sont généralement recommandées à cet égard :
- Horaires variables : permettre la négociation d’un horaire de travail souple répondant aux demandes du milieu de travail et de la famille.
- Semaine de travail comprimée : donner l’opportunité d’opter pour des journées de travail prolongées en échange d’une journée libre par cycle de paye.
- Travail à domicile : instaurer des politiquer permettant aux employés d’effectuer une partie ou la totalité de leur journée de travail à partir de la maison.
- Garderie : prévoir une garderie sur place ou une liste de services de garde recommandables.
Je voudrais que nous retenions en guise de conclusion à mon exposé le mot « Promotion » qui est souvent revenu. Je nous soumets de penser à Sigmund Freud pionnier de la psychanalyse qui nous enseigne que la promotion naît de la frustration qui elle-même vient du désir de changer de situation pour en obtenir une plus enviable. Gardons-nous juste de la satire de Freud qui nous avertit que les femmes étaient frustrées parce qu’elles ne pouvaient être des hommes ; les hommes étaient frustrés parce qu’ils ne pouvaient enfanter et enfin les petits garçons étaient frustrés parce qu’ils ne pouvaient épouser leurs mères.
M. Francis Attiogbe
Directeur des Ressources Humaines de la Compagnie ASKY
Lors de la séance de réflexion organisée le 31 mars par WANEP-Togo sur le thème
« Importance de l’égalité de genre au sein des organisations : concilier parité et besoin de performances »